Retraitée se partageant depuis des années entre la vallée du Florival et la Côte d’Azur, Christiane (*) est revenue en Alsace précipitamment il y a cinq mois car elle était sujette à de multiples symptômes, dont de violentes céphalées. Une fois en Alsace, ceux-ci se sont progressivement atténués, jusqu’à disparaître. La septuagénaire est persuadée que le compteur Linky est en cause.
(*) Tous les prénoms ont été modifiés
« C’était en octobre dernier, j’ai commencé par ne plus pouvoir dormir. Je ressentais une énorme nervosité, je n’arrivais plus à manger, je bégayais, j’avais des pertes de mémoire, des vertiges, et surtout des maux de tête épouvantables, à me taper la tête contre les murs. J’ai vraiment cru que c’était Alzheimer. Je n’arrivais plus à lire, plus à sortir… C’est simple, je ne faisais plus rien, je ne me reconnaissais plus. » Son ami confirme : « Je l’ai vue dépérir, maigrir, j’étais très inquiet. » En temps normal, Christiane est en effet une fringante septuagénaire pleine de vie, joyeuse, aimant sortir et bouger.
L’ami qui vient la chercher à l’aéroport de Bâle-Mulhouse s’inquiète également lorsqu’il constate que Christiane oublie sa valise, sort du côté suisse, oublie son téléphone portable sur un comptoir, comme le sachet contenant ses achats au duty free.
Pendant trois semaines, elle reste prostrée dans son appartement, en proie à de terribles céphalées. Des amis lui font les courses. Elle récupère progressivement. « Il m’a fallu trois mois pour aller mieux. Aujourd’hui, j’ai encore quelques absences, mais ce n’est rien par rapport à ce que j’ai traversé. »
« Je veux en avoir le cœur net »
C’est une remarque a priori anodine qui l’alerte, lorsque José l’informe que le compteur électrique a été changé dans sa propriété du Sud, sans qu’il en ait été avisé par EDF. Christiane établit alors le lien entre l’apparition de ses troubles et l’installation du compteur Linky. D’autant qu’il ne s’agit pas d’un seul nouveau compteur, mais de cinq, situés à environ 6 mètres de la chambre à coucher du couple. « À l’époque, je ne savais rien des débats suscités par les effets des ondes électromagnétiques émises par le compteur Linky, je cherchais simplement à comprendre ce qui m’arrivait. » Certains membres de son entourage proche se renseignent, lui fournissent de la documentation, des coupures de presse sur des cas similaires, tandis que d’autres lui diagnostiquent une tumeur au cerveau ou une sévère dépression, lui conseillant de prendre rendez-vous pour un scanner ou de voir un psychologue…
« C’est cela qui m’a le plus affectée , dit-elle aujourd’hui, avec le recul. Le plus dur était de lire dans les yeux des gens qu’on me prenait pour une folle. J’ai vécu cela comme un abandon. On ne me prenait pas au sérieux, on pensait que j’affabulais. Le mépris, la moquerie engendrent de la culpabilité et du repli. » Même son médecin traitant ne lui prête pas une oreille attentive et balaye ses craintes d’un revers de main, arguant que le compteur Linky n’y est pour rien dans ses troubles.
José cherche également à comprendre et contacte EDF, qui le renvoie vers le service client d’Enedis, gestionnaire du réseau de distribution d’électricité. Il explique qu’il habite cette maison depuis près de 35 ans, « sans problème ni perturbation » avant la pose des nouveaux compteurs communicants. En guise de réponse, Enedis lui expédie des dépliants vantant les vertus du compteur Linky, « compteur écologique au service de la transition énergétique et des territoires ».
Christiane compte se rendre dans la maison de son ami courant mai, après près de six mois d’absence.
« Je veux en avoir le cœur net. »